LE 01 AVRIL 2019
Aux termes de l’article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 : « Les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales doivent, à peine de déchéance, être introduites par les copropriétaires opposants ou défaillants, dans un délai de deux mois à compter de la notification desdites décisions qui leur est faite à la diligence du syndic(...) ». Il ressort de ce texte que seuls les copropriétaires opposant ou défaillants sont recevables à agir en contestation des décisions d’une Assemblée Générale. La Jurisprudence semblait en déduire qu’un copropriétaire ayant voté en faveur d’une ou plusieurs résolution, était irrecevable à solliciter l’annulation de la totalité de l’Assemblée Générale puisque cela reviendrait, en violation de l’article 42, à lui permettre d’obtenir l’annulation de résolutions qu’il avait acceptées.
Un arrêt de la Cour de cassation semblait en ce sens, mais sa portée exacte restait débattue (Cass. Civ. 3ème, 24 mars 2015, n°13-28799). Au demeurant, plusieurs décisions basculaient vers cette solution, très dure pour le requérant (TGI Paris, 13 juin 2012, n°10/10440 ; TGI Paris, 15 janvier 2013, n°10/13041 ; TGI Paris, 10 mai 2016, n°15/00848 ; TGI Paris, 9 septembre 2010, n°09/16717; CA Chambery, 9 mai 2017, n° 15/01747; CA Aix en Provence, 6 juillet 2017, n°16/00048; CA Riom, 30 avril 2018, n°16/02563 ; ou encore CA Riom, 5 février 2018, n°16/01245 : « Le Tribunal a donc justement retenu qu’en ayant approuvé certaines résolutions, Monsieur et Madame X ne pouvaient demander l’annulation de la totalité des résolutions de l’assemblée générale ; le jugement sur ce point sera confirmé »).
La Cour de cassation vient de trancher la question sans ambiguïté en confirmant ce courant jurisprudentiel. Par deux arrêts rendus le 14 mars 2019, elle approuve la Cour d'appel d'Aix-en-Provence d'avoir décidé qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation en son entier d'une assemblée générale dès lors qu'il a voté en faveur de certaines résolutions (Cass. civ. 3, 14 mars 2019, deux arrêts, n°18-10.379, FS-P+B+I et n°18-10.382, F-D).
La sanction est radicale : il est irrecevable à demander l'annulation de l'Assemblée Générale.
Dans une telle hypothèse, le demandeur aura été bien avisé de solliciter, à titre subsidiaire, l'annulation de certaines résolutions auxquelles il s'est opposé.
Cette voie reste ouverte de façon certaine tant que le délai légal de deux mois n'est pas expiré.Mais, une fois ce délai expiré, est-il possible de formuler une telle demande en cours de procédure, en complétant sa demande initiale d'annulation de la totalité de l'Assemblée ?
La Cour d'Appel d'Aix-en-Provence l'avait refusé dans l'une des deux décisions soumises à la Cour de cassation, au motif notamment que cette demande avait été présentée après l'expiration du délai de deux mois : dans ce délai, le copropriétaire opposant s'était contenté de demander l'annulation de l'Assemblée Générale dans sa totalité. La Cour a estimé que, les deux mois passés, il ne pouvait plus compléter sa demande en visant certaines résolutions en particulier.
La Cour de cassation infirme l'arrêt d'appel sur ce point, en rapprochant à la Cour d'appel de ne pas avoir "recherché si la demande subsidiaire en annulation de quinze décisions n’était pas virtuellement comprise dans la demande en annulation de l’assemblée générale" (n°18-10.379).
Autrement dit, la Cour d'appel aurait dû se prononcer sur le point de savoir si la demande d'annulation de toute l'Assemblée Générale, ne valait pas virtuellement recours contre certaines de ses résolutions, de nature à interrompre le délai légal de deux mois.
Cependant, la Cour de cassation ne répond pas à cette question et renvoie devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.
Il faudra donc patienter pour être fixé sur ce point.
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